Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/305

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vrement de la prospérité et de la puissance, tout plaisir innocent leur parut insipide ; et la loi Scatinia[1], qu’on n’avait arrachée que par force, fut insensiblement abolie par le temps et la multitude des coupables. Cette loi regardait le rapt et peut-être la séduction d’un jeune homme d’extraction libre comme une injure personnelle, et elle n’infligeait d’autre peine qu’une misérable amende de dix mille sesterces, ou de quatre-vingt livres sterling : il était permis à la chasteté qui résistait ou se vengeait, de tuer le ravisseur ; et j’aime à croire qu’à Rome ainsi qu’à Athènes, le déserteur volontaire et efféminé de son sexe perdait les honneurs et les droits de citoyen[2] : mais ce vice n’était pas flétri par la sévérité de l’opinion publique ; elle confondait cette tache ineffaçable avec les fautes moins graves de la fornication et de l’adultère, et le débauché n’était pas exposé au déshonneur qu’il imprimait sur l’homme ou la femme qu’il faisait participer à ses désordres. Depuis Catulle jusqu’à Juvénal[3], les poètes accu-

  1. Le nom, l’époque et les dispositions de cette loi, ont la même incertitude. (Gravina, Opp., p. 432, 433 ; Heineccius, Hist. jur. rom., no 108 ; Ernesti, Clav. Cicéron. in Indice legum.) Mais j’observerai que la nefanda Venus de l’honnête Allemand est appelée aversa par l’Italien plus poli.
  2. Voyez le discours d’Æschine contre le catamite Timarche (in Reiske, Orat. græc., t. III, p. 21-184).
  3. Les honteux passages se présentent en foule à l’esprit