Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/471

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il reçut un ordre péremptoire de risquer le sort de la Perse dans une bataille décisive. À l’est du Tigre et à l’extrémité du pont de Mosul, s’était élevée jadis la fameuse Ninive[1] ; cette ville et même ses ruines avaient disparu dès long-temps[2] ; son emplacement offrait un vaste terrain aux opérations des deux armées ; mais les historiens de Byzance ont négligé ces opérations ; et comme les auteurs des poëmes épiques et des romans, ils attribuent la victoire, non pas aux heureuses combinaisons, mais à la valeur personnelle du héros qu’ils célèbrent. Dans cette journée mémorable, Héraclius, monté sur son cheval Phallas, surpassa ses plus braves guerriers ; il reçut un coup de lance à la lèvre ; le coursier, blessé à la

  1. Ctésias (apud Diodore de Sicile, t. I, l. II, p. 115, édit. Wesseling) donne quatre cent quatre-vingts stades (peut-être trente-deux mille seulement) à la circonférence de Ninive. Jonas parle de trois journées de marche : les cent vingt mille personnes qui ne pouvaient y distinguer leur main droite de leur main gauche, dont parle le prophète, supposeraient environ sept cent mille personnes de tout âge pour la population de cette ancienne capitale (Goguet, Origine des Lois, etc., t. III, part. I, p. 92, 93), qui cessa d’exister six cents ans avant Jésus-Christ. Le faubourg occidental subsistait encore au premier siècle des califes arabes, et les historiens en parlent sous le nom de Mosul.
  2. Niebuhr (Voyage en Arabie, etc., t. II, p. 286) passa sur Ninive sans s’en apercevoir ; il prit pour une chaîne de collines un vieux rempart de briques ou de terre. On dit que ce rempart avait cent pieds de hauteur, qu’il était flanqué de quinze cents tours, élevées chacune de deux cents pieds.