Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 9.djvu/172

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trésor, fruit de ses cruautés et de ses rapines ; mais son successeur ne tarda pas à le dissiper par de vaines profusions. Le jour de l’anniversaire de sa naissance, Philippicus donna au peuple les jeux de l’Hippodrome ; il se montra ensuite dans toutes les rues, précédé de mille bannières et de mille trompettes, alla se rafraîchir dans les bains de Zeuxippe, et, de retour à son palais, il y donna un festin somptueux à sa noblesse. À l’heure de la méridienne, il se retira au fond de son appartement, enivré d’orgueil et de vin, et oubliant que ses succès avaient rendu ambitieux chacun de ses sujets, et que chaque ambitieux était secrètement son ennemi. Au milieu du désordre de la fête, de hardis conspirateurs pénétrèrent jusqu’à lui, surprirent le monarque endormi, le garottèrent, lui crevèrent les yeux et le déposèrent avant même qu’il eût eu le loisir de sentir toute l’étendue de son danger. Mais les traîtres ne profitèrent pas de leur crime ; le choix du sénat et du peuple revêtit de la pourpre Artémius, qui exerçait auprès de l’empereur déposé les fonctions de secrétaire. [Anastase II. A. D. 713. Juin 4.]Artémius prit le nom d’Anastase II, et durant un règne court rempli d’agitations, déploya, soit dans la paix, soit dans la guerre, les vertus qui conviennent à un souverain. Mais, par l’extinction de la ligne impériale, le frein de l’obéissance avait été rompu, et chaque avénement au trône répandait les germes d’une nouvelle révolution. Dans un soulèvement de la flotte, un obscur officier du fisc fut revêtu malgré lui de la pourpre ; après quelques mois d’une guerre navale,