Page:Gide - Les Nourritures terrestres.djvu/178

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suite de choses fuyantes. — Je courus hier au haut des collines qui dominent Blidah, pour voir un peu plus longtemps le soleil ; pour voir se coucher le soleil et les nuages ardents colorer les terrasses blanches ; je surprends l’ombre et le silence sous les arbres ; je rôde dans la clarté de la lune ; j’ai la sensation souvent de nager, tant l’air lumineux et chaud m’enveloppe et mollement me soulève.

… — Je crois que la route que je suis est ma route, et que je la suis comme il faut. Je garde l’habitude d’une vaste confiance qu’on appellerait de la foi, s’elle était plus assermentée.

Biskra.

Des femmes attendaient sur le pas des portes ; derrière elles un escalier droit grimpait. Elles étaient assises, là, sur le pas des portes, graves, peintes comme des idoles, coiffées d’un diadème de pièces de monnaie. La nuit, cette rue s’animait. Au haut des escaliers brûlaient des lampes ; chaque femme restait assise dans cette niche de lumière que la cage de l’escalier lui faisait ;