Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/322

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percussion, tout impôt payé par un producteur ou un commerçant est ordinairement reporté par lui sur sa facture et vient frapper le consommateur. À plus forte raison en sera-t-il de même du producteur étranger. En fait, les droits à l’entrée ont pour effet ordinaire de s’ajouter non seulement au prix des marchandises importées, mais au prix de toutes les marchandises similaires consommées à l’intérieur, en sorte que le public se trouve payer de sa poche, sous la forme de supplément de prix, dix fois ce que perçoit l’État. Supposons qu’il entre en France 10 millions de quintaux de blé étranger valant 20 francs au débarquement. Par suite de la concurrence de ce blé étranger, les 80 millions de quintaux de blé (qui représentent à peu près la production de la France) ne se vendent aussi que 20 francs, et c’est justement ce dont on se plaint. Mettons alors un droit de 5 francs à l’entrée du blé étranger. L’État touchera par la main de l’administration des douanes (en supposant que ce droit n’ait pas pour effet de réduire les quantités importées) 10 x 5 = 50 millions de francs. Mais regardons maintenant au public non seulement il paiera 5 francs de plus pour chaque quintal de blé étranger, soit 50 millions ce qui représente déjà précisément l’équivalent de ce que l’État a perçu mais de plus, les producteurs français s’efforçant naturellement de vendre leur blé au même prix que les producteurs étrangers, il paiera 5 francs de plus pour chaque quintal de blé produit en France, soit donc 80 X 5 = 400 millions de francs. C’est-à-dire en somme que ces droits protecteurs auront rapporté 50 millions à l’État et 400 millions aux producteurs nationaux, mais ils auront coûté 450 millions aux consommateurs.

Enfin admettons même l’argument dans toute sa force. Supposons que les droits protecteurs soient supportés par les étrangers. Qu’en résultera-t-il ? Évidemment alors les prix des produits étrangers ne seront pas modifiés, par conséquent leur concurrence et l’influence déprimante qu’ils pouvaient exercer ne sera pas atténuée, et finalement l’industrie nationale n’obtiendra point du tout ce qu’elle souhaitait, à savoir un relèvement du prix : elle ne sera donc nullement