Page:Gilbert - Le Dix-huitième Siècle, 1775.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Heureux qui, jeune encor, a ſenti leur mérite :
Même, en les ſurpaſſant, il faut qu’on les imite :
Mais les Sages du jour ou d’heureux novateurs,
De leur goût corrompu partiſans corrupteurs,
Pour s’aſſeoir ſur le Pinde au rang de nos ancêtres,
Ne pouvant les atteindre, ont dégradé leurs maîtres.
Boileau, dit Marmontel, tourne assez bien un vers ;
Ce Chantre gazettier, Pindare des déſerts,
La Harpe, enfant gâté de nos penſeurs ſublimes,
Quelquefois, dans Rouſſeau, trouve de belles rimes.
Si l’on en croit Mercier, Racine a de l’eſprit ;
Mais Perraut, plus profond, Diderot nous l’apprit,
Perraut, tout plat qu’il eſt, pétille de génie :
Il eût pû travailler à l’Encyclopédie.
Périſſe Boſſuet ! quoi ! ton pinceau flatteur
Souilla de ſon éloge un papier impoſteur ?
Étoit-il philoſophe ? aveugles que nous ſommes !
Combien l’erreur publique a fait de faux grands hommes !
Enfin la raiſon luit ; leurs talens ſont jugés ;
Des affronts du ſifflet les Cotins ſont vengés :
Voltaire en ſoit loué ! chacun ſçait au Parnaſſe
Que Malherbe eſt un ſot & Quinaut un Horace :
Dans un long commentaire il prouve longuement
Que Corneille par fois pourroit plaire un moment,
Et tous ces Demi-Dieux que l’Europe en délire
A, depuis cent hivers, l’indulgence de lire,