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Page:Gilbert - Les Lettres françaises dans la Belgique aujourd’hui, 1906.djvu/20

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Le titre même de ses écrits décèle la tournure intellectuelle et morale de sa personnalité. Outre les Lettres à José, — qui réunissent sa correspondance avec l’un de nos aimables romanciers de demi teintes, le baron José de Coppin, — ce sont les Feuillées, les Heures de philosophie, les Jours de solitude, et Bémo, souvenir d’un frère... Pirmez fut un croyant. Son âme, essentiellement chrétienne, resta comme à jamais endeuillée des premières souffrances que la vie réserve aux cœurs sensibles et fiers. Aussi sa tristesse a-t-elle toujours quelque chose de religieux ; il y a comme un arrière accent de psaumes dans les gémissements que lui arrache le mal de vivre. Ceci explique encore le frisson d’espérance surnaturelle qui traverse et soulève parfois sa désolation... Mais le poète était, en lui, doublé d’un moraliste, d’un psychologue aigu, qui semblait avoir fait le tour des philosophies et connu, finalement, que tout est vanité. Sa pensée aimait à scruter les plus ardus problèmes, sans se perdre jamais dans la nébuleuse cogitation des esprits germaniques et fumeux. Cette constante élévation du cœur et de l’intelligence, sans rien de prétentieux sans déchets de morgue ou de pédantisme, faisait pour une grande part le charme insinuant et despotique de cette figure qui n’a point été remplacée. Il serait outrecuidant de prétendre découvrir en quelques lignes, à ceux qui l’ignoreraient encore, une physionomie tout ensemble aussi simple et aussi complexe. Une citation peut, néanmoins, faciliter notre tâche. J’ouvre au hasard le volume des Jours de solitude, et je me borne à en transcrire une page, significative de la manière propre à l’auteur : « C’est aujourd’hui le jour des morts ; leurs âmes semblent frémir dans les bruits qui m’environnent. J’étends les bras pour y serrer ceux que le destin