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Page:Gilbert - Les Lettres françaises dans la Belgique aujourd’hui, 1906.djvu/26

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Germinal dans les Concubins ou dans Happe-Chair romans d’un matérialisme déprimant, il devait, plus tard, traduire les nuances les plus exquises et les plus fragiles de l’âme, la plus fine sensibilité et la tendresse humanitaire la plus éperdue dans les Con tes flamands, dans l' Arche, dans le Vent dans les moulins, dans le Petit homme de Dieu ou dans Comme va le ruisseau. Le peintre rubénien, le coloriste visionnaire imprimèrent leur sceau sur l’Hystérique, sur le Mort, sur un Mâle surtout. Mais, soudain, une sorte d’évangéliste laïque et un philosophe panthéiste surgirent dans des productions animées d’un lyrisme subtil et psychologique : Au cœur frais de la forêt, Adam et Eve, Vile Vierge. Dans certaines de ses œuvres, L’homme en amour par exemple, M. Camille Lemonnier s’est révélé l’explorateur hardi et cru des aberrations amoureuses. Il faut bien encore insister, — puisque là gît, en effet, sa personnalité, ce qui surtout le distingue d’un grand nombre de romanciers français auxquels il s’apparente par quelques côtés, — il faut, dis-je, insister sur ce partage de sa nature et de son tempérament artistiques, sur les deux tendances qui, despotiquement, dirigèrent son art et qui, parfois, se sont succédé et parfois superposé : la joie frénétique de vivre, l’attirance vers la couleur épanouie librement avec toutes ses brillantes éclaboussures, le goût pour une manière de lyrisme épique exacerbé, la hantise des truculences et des matérialités, et, — d’autre part, - l’action d’un mysticisme légendaire et même religieux, l’attendrissement dans les familiales intimités, la compréhension de leur poésie, candide mais éternelle, et l’observation pieuse qu’il a toujours apportée à les traduire avec une ferveur inspirée.

Il importe aussi de dire quel patient et infatigable ouvrier verbal fut ce romancier dont l’œuvre