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Page:Gilbert - Les Lettres françaises dans la Belgique aujourd’hui, 1906.djvu/34

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mais il ne nous fait point oublier que la vraie nature intime de l’auteur se manifesta plus spontanée et plus pleine dans les contes ingénus signalés plus haut ou dans des histoires émouvantes et apitoyées comme le Cœur des Pauvres, ou encore, dans les imaginations merveilleuses de la Véridique Histoire du Grand Saint Nicolas.

« Le décor de ces contes — a écrit M. E. Verhaeren, — fait songer à des paysages d’un Savary ou d’un van Momper, les scènes à celles du vieux Breughel. Plus que n’importe quel autre d’entre nous, il prouve de quel pays de peintres il sort et combien, à certains égards, le mouvement actuel n’est que la résurrection, non d’une ancienne école littéraire, mais d’une ancienne école plastique, autrefois glorieuse en Flandre. »

Il convient donc de prêter une attention toute spéciale au style de cet écrivain ; d’abord trop éclatant, lui aussi, trop pailleté, trop damasquiné, trop caparaçonné de métaphores, de vocables expressifs mais redondants et redoublés, ce style, sans rien perdre de sa richesse tout en modérant son éclat, est devenu singulièrement séduisant. Il charme par sa clarté cristalline, par la variété de ses ressources et de ses teintes, par le pittoresque des images, par l’imprévu des rapprochements, et enfin par l’abondance inépuisable du lexique.

A première vue, il ne semble pas que la terre wallonne ait produit des artistes d’une trempe aussi foncièrement individuelle et d’un aussi âpre relief que M. Eekhoud, par exemple. Mais, par contre, quels conteurs attrayants ce coin fleuri et ensoleillé de la terre belge a suscités 1 Nommons avant tout MM. Louis Delattre, Maurice des Ombiaux, Hubert Krains et Paul André.