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plus en plus l’imaginaire et le réel, — la double face de la vie.


III


Les vingt-huit fresques dont se compose la vie de saint François sont loin d’être tout entières de la main de Giotto. Le regard le plus superficiel suffit pour y observer des inégalités. Sans doute Homère lui-même sommeille quelquefois ; mais on se trouve ici en présence d’une distribution méthodique du travail. Venturi distingue quatre artistes différents : chacun a fait ainsi à peu près le quart de l’œuvre commune. Giotto, qui paraît avoir eu la haute main sur l’ensemble, s’est réservé sa part avec une certaine fantaisie[1].

Il a suivi le texte officiel de saint Bonaventure. L’ordre adopté n’est pas l’ordre chronologique. Saint Bonaventure lui-même explique dans sa préface qu’il juge ce point de vue frivole et indigne de l’histoire : il ne s’agit pas d’éparpiller, sous prétexte de fidélité, des choses qui se présentent éparses dans le temps, mais que la pensée rassemble sous une rubrique commune. Toujours, on

  1. Il aurait peint, suivant Venturi : 1o la première fresque, à commencer à droite, du côté de l’épître, à l’angle du transept (Un homme d’Assise étend son manteau sous les pas de François) ; 2o la seizième, qui se trouve la première du côté opposé, en suivant l’ordre des scènes, qui font le tour de l’église (La mort subite du seigneur de Celano) ; 3o en suivant toujours, les six fresques (XIX à XXIV) qui vont des Stigmates à la Canonisation. Il est d’ailleurs bien difficile, dans l’état de ces peintures, de se prononcer à ce sujet d’une manière absolue. J’envie, en de telles matières, les gens qui ont des certitudes.

    Quant au tableau du Louvre, Saint François recevant les stigmates, qui provient du couvent de Pise, où Vasari l’a vu, ce n’est certainement pas, en dépit de la signature qu’y a lue Da Morrona, une œuvre de Giotto : Venturi y voit avec raison un résumé des fresques d’Assise, un « souvenir » comme l’église-mère en envoyait aux maisons de l’ordre. Les mots : opvs iocti florentini ne font que certifier la marque d’origine. Cf. Venturi, Storia, vol. V, p. 303.