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l’art du moyen âge : l’un est son attitude constamment méprisante à l’égard de la virtuosité, l’absence de dilettantisme, le dédain de « l’art pour l’art ». L’Église n’est nullement l’ennemie du talent, mais veut qu’il serve, se subordonne. Il est un moyen, non une fin. Il a son principe et son but en dehors de lui-même. Il ne se justifie que par l’utilité, l’édification. Secondement, et corollairement, le caractère cosmopolite ou international. À cette date, en effet, il n’y a pas proprement d’art ni de poésie, de sculpture ou de peinture française ou italienne, allemande ou espagnole : il n’y a qu’un génie commun à toute la chrétienté. On en a fait un reproche à la pensée du moyen âge. On peut y reconnaître aussi bien sa grandeur. En tout cas, romanes ou gothiques, bénédictines ou cisterciennes, l’ubiquité ou, pour mieux dire, la catholicité des grandes écoles monumentales suppose l’existence de ces vastes républiques monastiques. Seules leurs phalanges omni-présentes disposaient du pouvoir d’instituer partout une discipline universelle et d’imposer au monde une idée générale.

La période de quatre ou cinq siècles, — allant de la fin du XIIIe à la moitié du XVIIe, — dont ces leçons se proposent d’embrasser l’histoire religieuse et artistique, est l’une des plus intéressantes. C’est celle qui est marquée par la création et par l’activité des Ordres Mendiants. On appelle ainsi, on le sait, des formations religieuses d’une nature très particulière, en ce que, comme leur nom l’indique, elles font profession de rejeter toute espèce de propriété individuelle ou collective, pour vivre au jour le jour, sans capital ni économies d’aucune sorte, du travail de leurs membres et des aumônes des fidèles. C’est, à l’égard de la pauvreté, la stricte application de la prière évangélique : Panem quotidianum da nobis hodie. Ces formations, em-