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Un bel exemplaire de Poliphile coûte un ou deux milliers de francs. Mais c’est en France que le livre eut le plus grand succès[1] ; il obtint quatre éditions au cours du xvie siècle, et vous aurez tantôt une preuve de sa longue influence.

L’auteur est un dominicain du couvent de Trévise. Il s’appelait Frà Francesco Colonna. On a découvert son nom en réunissant les initiales de la table des chapitres, qui forment cette phrase : Poliam frater Franciscus Columna peramavit, Frère François Colonna adora Polia. Il écrivait, je l’ai dit, en 1467[2]. Il mourut à Venise, au couvent de Saint Jean-Saint Paul, en 1527, dans un extrême état de vieillesse et de décrépitude[3]. Vous trouverez d’autres détails, légèrement arrangés, dans la jolie nouvelle que Charles Nodier a consacrée à Francesco Colonna[4].

  1. L’édition originale a paru à Venise, en 1499 in-folio ; une seconde, au même lieu, et identique à la première, en 1545. La première édition française, revue par Jean Martin, fut publiée l’année suivante à Paris, chez Kerver ; c’est plutôt une adaptation, un résumé qu’une traduction ; les bois originaux ont été retouchés et perfectionnés par une main nouvelle ; ils ont moins de grandeur et plus de délicatesse ; on n’a jamais su l’auteur de ces remarquables ouvrages. Cette édition fut réimprimée en 1554 et 1561. Une quatrième édition fut donnée en 1600 par Béroalde de Verville qui semble avoir vu dans le Songe un manuel d’occultisme. Une édition anglaise fut donnée en 1592. — Il a paru enfin : 1° un abrégé du texte en français par Legrand, 1804, 2 vol. in-12o ; 2° une traduction intégrale par Claudius Popelin avec la réduction des gravures de Kerver, 2 vol. in-8o, 1883 ; 3° un fac-similé de l’édition princeps. Londres, Methuen, 1903.
  2. Dernières lignes du livre : Tarvisii cum decorissimis Poliæ amore lorulis distineretur misellus Poliphilus MCCCCLXYII. Kalendis Maii. Frà Colonna était alors lecteur de rhétorique à Saint-Nicolas de Trévise, fonction qu’il conserva jusqu’en 1472. Né en 1433, il avait donc trente-quatre ans lorsqu’il écrivait son roman. Marchese, Memorie, t. I, p. 429-434.
  3. « P. M. Francisco Colonna omni die dentur tot ligna quot poterit portare famulus infirmariæ ; et a sacrista quatuor solidi omni die, et panis et vinum pro collatione ; et hoc pro maxima aegestate, necessitate et decrepitate. » Décision du chapitre des saints Jean et Paul, 15 octobre 1523, publiée par Marchese, t. I, p. 430. Frère Colonna avait à cette date quatre-vingt-dix ans. Il s’éteignit quatre ans plus tard, le 2 octobre.
  4. Franciscus Columna, dernière nouvelle de Charles Nodier, 1844. Cf., outre les Mémoires de Marchese ; Ilg, Ueber die Kunsthistorischen Werth