Page:Gillet - Histoire artistique des ordres mendiants.djvu/319

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phant qui porte sur son dos une aiguille (C’est cet éléphant qu’on a tant reproché à Bernin[1], qui l’a érigé à Rome sur la place de la Minerve. On prend cette fantaisie pour une folie baroque : c’est le caprice d’un religieux du xve siècle).

Après ce premier contact avec l’antiquité, Poliphile rencontre cinq belles jeunes filles, groupe digne de Giorgione ou de Botticelli ; elles portent les noms grecs des sens, et mènent le voyageur au bain. Le symbole est clair : il faut que le néophyte commence par se débarbouiller de la crasse scolastique et ne se fie, pour connaître le vrai, qu’aux données de la nature. Entre temps, description de cette fontaine de Jouvence, et reconstitution de thermes et de piscines antiques. De là, les Nymphes mènent leur hôte au palais de la reine Eleuthérilide. Faut-il expliquer ce nouveau mythe ? C’est la reine de Rabelais, l’abbesse de Thélème, celle dont la devise est : « Fais ce que vouldras ». Festin solennel et notions sur l’hygiène et sur la médecine. On vient de là insensiblement aux propriétés des pierres précieuses et à leurs vertus spécifiques. Danses antiques ; jardin de verre, jardin de soie et labyrinthe. Au centre du labyrinthe, nouvelle pyramide. Traduction des hiéroglyphes. Suivent, sur quatre chars, quatre triomphes des dieux. Polia, que Poliphile a retrouvée sans la reconnaître chez Eleuthérilide, lui explique les triomphes et continue en racontant les histoires des mortelles dont s’éprirent les dieux. Puis, c’est le tour des beautés qu’ont chantées les poètes : après Antiope, Alcmène, Erigone, Hellé, Cal-

  1. Le monument de Bernin est de 1665. L’idée appartient sans doute à Alexandre VII ; on a un exemplaire de Poliphile à ses armes et tout annoté de sa main. Cf. Fraschetti, Il Bernini, Milan, 1900, p. 304 ; Jean d’Udine avait déjà exécuté une fontaine semblable dans les jardins de la villa Madame. Cf. Vasari, t. VI, p. 556. Pour l’ «entrée» de Henri II à Paris, en 1549, entrée dont les impresarii furent Jean Goujon et Jean Martin, on utilisa cette gravure de Poliphile, mais l’éléphant fut remplacé par un rhinocéros (communication de M. Paul Dupuy).