flamande, dit-il, plaira aux personnes dévotes plus qu’aucune peinture italienne. Celle-ci ne fait pas verser une larme, tandis que l’autre fera pleurer tant qu’on voudra, — ce qui ne tient pas, d’ailleurs, au mérite de l’ouvrage, mais uniquement à la sensibilité du dévot. La peinture flamande, ajoute-t-il, paraîtra belle aux femmes, surtout aux vieilles ou aux très jeunes, aux moines, aux religieuses, et à ces gens du monde qui sont des Philistins. Les Flamands recherchent l’imitation du réel jusqu’au trompe-l’œil ; ils représentent des sujets qui plaisent ou qui amusent (il pense au paysage et aux scènes de genre), ou bien des personnages vénérables par eux-mêmes, des saints et des prophètes… D’ailleurs, on peint plus mal qu’en Flandre… mais il n’y a de vraie peinture qu’en Italie[1]. » Dürer, à la même date à peu près, écrit : « L’art de peindre s’emploie au service de l’Église pour montrer les souffrances du Christ et d’autres bons modèles ; il conserve aussi la figure des hommes après leur mort »[2]. Rapprochez seulement ces deux définitions, ou
- ↑ Quatre dialogues sur la peinture de Francisco de Hollanda, portugais, mis en français par Léo Rouanet, 1911, p. 28 et suiv.
- ↑ Cf., dans Thausing, Dürers’ Briefe und Tagebücher, Vienne, 1872, p. 154 et suiv., les belles prières ou méditations en vers, Die Sieben Betstunde : « Vers l’heure de vêpres, on descendit Jésus de la croix, et on le remit à sa mère. En ce jour, la toute-puissance du maître resta entièrement cachée dans le sein de Dieu ! O homme, contemple cette mort, remède de ta grande détresse ! Marie, couronne des vierges, reconnais le glaive de Siméon ! Ici repose l’abrégé de toute perfection, celui qui nous a délivrés du péché ! O toi, Dieu et Seigneur tout-puissant, nous contemplons avec grande compassion les tourments et la mort cruelle que Jésus, ton fils unique, a soufferts pour nous racheter. Donne-moi une vraie contrition de mes péchés, rends-moi meilleur, je t’en supplie de toute mon âme ! Seigneur, par ton triomphe, laisse-moi un jour avoir part à ta victoire ! » Voir encore, au même endroit, les pensées de Dürer, si religieuses, sur la mort.
On voudrait savoir à ce propos, quelque chose des rapports de Dürer avec les Mendiants, — soit les Dominicains de Francfort, pour lesquels il a peint le triptyque Heller (1509), soit les Franciscains, dont on se demande si ce n’est pas pour eux qu’il a gravé le Saint François recevant les stigmates, ou sous leur influence qu’il a exécuté ses quatre Passions. On connaît ses relations amicales et enjouées avec Charité Pirkheimer, la sœur de Willibald, et la supérieure des Clarisses de Nuremberg. Voir la lettre de celle-ci à