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PINDARE

il chante ; il croit comme elle à ces légendes dont la fête elle-même pour laquelle il les expose, les sacrifices, les temples, les mœurs sont les vivants témoignages ; il y croit comme elle, mais pas plus, et sans que sa foi aux formes diverses qu’elles peuvent revêtir dans le détail soit plus profonde que ne le comporte cette matière légère et mobile. Cela suffit pour qu’aucun nuage de scepticisme n’altère la gravité de sa noble figure.

Ce qui le distingue de la foule, c’est qu’à côté de cette croyance commune aux formes sensibles de la religion, il y en a chez lui une autre qui va au fond, et prend ce qu’on appellerait aujourd’hui un caractère spiritualiste. Elle suit en cela le mouvement d’une grande philosophie, celle de Pythagore, qui reste religieuse, et d’une religion particulière, l’orphisme, qui est animée d’un esprit philosophique. Cette philosophie et cette religion, pendant la jeunesse de Pindare, avaient profondément pénétré certaines parties de la société antique. Ce n’est pas qu’il soit lui-même orphique ou pythagoricien : il est poète ; mais ce serait enlever à sa poésie ce qui en fait l’inspiration principale et le caractère, que d’y nier une influence qu’il subit alors avec un certain nombre d’esprits d’élite. S’il ne s’attache pas à un système, s’il ne tend pas, comme l’orphisme, à réunir et à confondre les dieux, du moins rapproche-t-il chacun d’un idéal commun de grandeur et de per-