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ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

privilège de jouir depuis trois quarts de siècle de sa propre gloire, plus florissante aujourd’hui qu’il y a vingt ans. Victor Hugo fait de lui-même avec plus de succès ce que Ronsard conseillait de tenter sous l’inspiration de la muse grecque. Comme lui, il s’attache à l’étude des rythmes, à la recherche des vocables signifiants, qui représentent et peignent les objets par leurs caractères saillants et extérieurs. On peut trouver parfois entre le poète des Orientales et le chef de la pléiade une certaine ressemblance de goût et de procédés dans l’emploi de deux matières différentes. Ronsard était épris de l’antiquité : aux richesses mythologiques le poète français préfère celles que lui offrent les mœurs locales, en Espagne, en Orient, et dont l’éblouissement l’attire. Ce qui le distingue de Ronsard et le rapproche du lyrique thébain, c’est que partout il distribue à flots la lumière, la couleur et la vie. Sa poésie, comme celle de Pindare, se meut, s’illumine de rayons rapides, se répand en sonorités éclatantes ou se repose sur des harmonies éteintes. Il faudrait citer ; mais comment choisir dans cette multitude de beaux vers ? D’ailleurs les beautés de Victor Hugo ne sont pas de celles qui se découvrent par un effort d’analyse ; elles frappent d’elles-mêmes les yeux et les oreilles, et elles abondent. On pourrait transcrire, comme un exemple d’expression musicale et de