Page:Girardin - La République et les Républicains.djvu/10

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quoi que l’on fasse, la modération est toujours dans l’esprit des masses. Toutefois il est bien vrai qu’alors aussi il y eut des républicains de la veille qui ne manquèrent point de crier à la réaction contre les nouveaux républicains, parce que ceux-ci comprenaient une république dégagée de toutes les horreurs qui avaient accompagné la première.

Le directoire, que, sous beaucoup de rapports, on pourrait comparer au gouvernement issu de la révolution de juillet, le directoire, disons-nous, faillit à toutes les espérances qu’il avait permis de concevoir. Ce fut un état d’anarchie molle, un louvoiement entre les partis en lutte, une république d’agioteurs et de fournisseurs, marchandant au soleil des autorités à l’encan, et en même temps une espèce de régence républicaine, tant fut grande la démoralisation pendant cette période. Nos armées seules répandirent sur tant de turpitudes une immense auréole de gloire. Les portes de la France ayant été rouvertes à l’émigration, il se forma à Paris et dans les provinces un parti royaliste puissant, ayant des accointances dans les conseils du gouvernement et jusque dans le sein du directoire ; les anciens jacobins s’en émurent non sans raison ; eux aussi ils se firent réactionnaires ; tout menaçait ruine, tout devait s’écrouler ; rien ne se faisait, ni par le peuple, ni pour le peuple, partout des meneurs avides, de sorte que, quel que soit le jugement que l’on porte après coup de la révolution du 18 brumaire, nul n’osera nier que la masse du peuple salua avec un enthousiasme aussi sincère qu’universel l’aurore de notre troisième république, de la république consulaire.

À l’exception de rares dissidences appartenant aux deux extrêmes opposés, tout le monde, en France, devint bientôt républicain selon la nouvelle république. Que si, d’ailleurs, nous voulons bien apprécier ce temps et juger sainement l’entraînement de la nation pendant les premières années du consulat, il nous faut oublier, comme on les ignorait alors, les événements qui se sont succédés depuis, et par conséquent ne point voir un