Page:Giraudoux - Adorable Clio.djvu/102

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fenêtres des maisons construites en Espagne sous des aqueducs, sous un aqueduc de science, de nuit, les fenêtres de mon étude. Fenêtres si hautes qu’aucun élève ne peut voir la cour ; percées sur l’étude comme pour observer les enfants, percées des deux côtés pour les observer de dos, de face, suivre sur leur visage dans la même journée tous les progrès de l’ombre et de la science, et d’où personne jamais ne les regarda, si ce n’est cette folle qui s’évadait de Sainte-Catherine pour voir de là son fils, et si ce n’est moi aujourd’hui… Je me hisse, je me penche, je tressaille ; je m’attendais à voir un élève solitaire, un visage unique, ma seule enfance ; j’en vois vingt, j’en vois trente ; et aucun ne me ressemble, et tous il est si clair qu’ils sont moi ; j’ai été celui là-bas qui écrit de la main gauche, j’ai été ce roux qui a un tic au front, j’ai été ces deux indolents qui tracent au tableau, pour abuser le maître, des figures sans rapport avec leurs paroles.