Page:Giraudoux - Adorable Clio.djvu/214

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aussi prononçait une phrase avec des mots abstraits ; une autre avec des noms de villes, françaises cette fois ; il s’agitait, devenait rouge au mot de Joinville-sur-le-Pont ; tu l’approuvais en hochant la tête, et quand il s’apaisait, le discours fini, te retournant vers nous, tu nous disais :

— Le colonel vous remercie de vos remerciements.

Et tout ainsi se passait entre vous deux, et tu nous rendais le mot aimable après que vous l’aviez tous deux gonflé à l’excès et épuisé, comme l’on rend une fois vieilli, à nouveau vides, les petits sentiments que l’on vous confia enfant, et qui furent dans votre vie l’amour, l’orgueil et l’amitié.

Alors nous visitions les casernes, les officiers supérieurs se regardant bienheureux quand un réserviste avait apporté un oreiller de dentelle ou qu’un cheval s’appelait Zeppelin. Les enfants nous poursuivaient avec les journaux de Lisbonne, encadrés de noir quand un sénateur français, Trouillot,