Page:Giraudoux - Provinciales.djvu/112

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secouait en parlant deux larges bagues d’or qui pendillaient, s’usant à ses joues poilues, dans de larges trous que lui seul avait pu forer.

Jean hésitait, car aujourd’hui même, au sortir de la messe, il avait poursuivi à coups de pierres une bande de fillettes, mais le petit duc l’entraînait, lui donnant le bras, un bras couvert d’étoffes légères à travers lesquelles on sentait la chair comme une pâte parfumée, balançant son cou arrondi et magnifique, et l’on devinait que c’était bien là le fils des comtesses décolletées. Le cœur de Jean s’arrêtait, et pourtant son pouls battait à se rompre.

L’école était en dehors du bourg, loin de la scierie, loin des forges, isolée de tout ce qui n’est pas la science. Des cerisiers peureux l’entouraient, qui haussaient leur givre de fleurs vers la lune rousse pour la persuader qu’ils étaient déjà gelés. La cloche endormie dodelinait. Une ou deux fois, cet hiver, le vent de La Châtre soufflant, elle avait sonné d’elle-même, et tous les enfants s’étaient regardés, bienheureux.

Quelques boulettes de papier accueillirent les amis. Le petit duc voulut expliquer que le père Bouvet attendait à la mairie, mais il s’embrouil-