Page:Giraudoux - Provinciales.djvu/200

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D’une masse, elle y tomberait au retour de chaque rendez-vous. Ce serait au milieu du grand jour, au moment où le soleil, du zénith, se demande s’il redescendra du côté du matin ou du côté du soir. Ce serait vers trois heures, quand tout va à hue, quand tout va à dia, si bien qu’elle devrait parfois se relever pour remonter la pendule ou pour rajuster un cadre. Ce serait vers le crépuscule, à l’heure où l’on ne sait s’il faut laisser mettre tout le couvert par la bonne. Elle entendrait de sa chambre les bruits de vaisselle, et si une pile d’assiettes s’écroulait, elle se sentirait trop indulgente pour gronder : tous trois mangeraient le potage dans des assiettes à dessert.

Car, pour que le pharmacien n’ait pas de soupçon, l’agent voyer est invité une fois par semaine. Ils s’en vont ensuite, par la grande route, jusqu’au pont que l’agent voyer fit construire. Des tombereaux passent, et les moyeux ruisselants de cambouis effleurent l’agent voyer, si bien que son hôte apostrophe les voituriers, qui l’injurient. Et l’on revient du même pas, l’agent voyer sur la droite, enjambant les rigoles régulières qui articulent l’accotement. Elle se récrie devant les oies, devant les dindons et pin-