Page:Giraudoux - Siegfried et le Limousin.djvu/137

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Elle récita :

« Sainte Marie, Mère de Dieu, délivrez le monde de la race horrible des Français. Vous qui êtes pleine de grâces, vous qu’écoute le Seigneur, faites des lieux où ils prétendent vous vénérer, Lourdes et autres, des lieux de catastrophe et de ruine. Vous qui n’avez pas intercédé pour les Mèdes assassins, les honteux Carthaginois, laissez le Christ vengeur répandre sur eux son soufre et sa poix. Priez pour nous, pauvres pécheurs, qui allons reprendre nos armes pour chasser les Nègres du Rhin, les Annamites du Neckar, les Marocains de la Moselle, et, comme aux merveilleuses Vêpres siciliennes, massacrer les Français dans leurs culottes rouges, battre d’orties les Françaises enduites de leurs fards, et disperser leur engeance avec celle des Serbes et des honteux Roumains. Dites à sainte Catherine de laisser flamber leurs demeures. Dites à sainte Barbe de laisser exploser leurs mines. Que les cent mille bœufs livrés par nous empestent leurs troupeaux. Que les cent mille wagons livrés par nous soient dans leurs attelages de trains les coursiers noirs. Ainsi soit-il… » Voilà ! Il n’est pas un enfant bien né en Bavière qui ne récite cette invocation sur sa petite descente de lit alors que monte la lune derrière les vitraux.

Elle réfléchit :

— Que font les petits Français à pareille heure ?

— Ils disent aussi leur oraison. Vous voulez la connaître ?

Je récitai :

« Saint Gabriel, nous te rendons ton glaive qui a vaincu le petit Hindenburg. Saint Michel, nous te