Page:Giraudoux - Siegfried et le Limousin.djvu/222

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Kleist voulut parler, mais M. von Salem le pria de lui céder son tour.

— C’est cela, dit Kleist, que M. von Salem parle en notre nom.

— Pas du tout, dit von Salem. Je tiens à parler d’abord pour moi-même. Je tiens à protester contre l’attente qu’on m’a imposée dans les salles du Trésor, réservées aux ministres étrangers. Depuis 1341, les Salem ont entrée directe auprès des Wittelsbach. Si je devais attendre, ce ne pouvait être que dans la salle Grenat. Mais j’ai peur que le comte von Zelten ne connaisse pas plus les chemins de la Résidence que les avenues du cœur allemand.

Zelten était allé prendre au dossier du Trône le portrait de sa mère, et l’avait remis dans sa poche.

— Et puis ? dit-il.

Il n’y avait aucune chaise ou fauteuil dans la pièce, et l’on ne pouvait guère s’accouder à la cheminée qui avait huit pieds de haut… J’étais sut le point de tomber de fatigue… Kleist s’avança :

— De la part du Sénat et de la Chambre, dont je suis le mandataire, je demande à Zelten combien de minutes encore il entend prolonger cette plaisanterie…

— Le mandataire de qui ? demanda Zelten.

— D’un pays que vous vous retirez le droit de dire vôtre, l’Allemagne.

— Messieurs, dit Zelten, dans une heure j’aurai quitté le palais. Ce n’est pas vous qui m’en chassez, ni l’Allemagne. Je persiste à croire que les vrais Allemands sont avec la paix, l’amour des arts et la fraternité. Ce qui m’en expulse, ce sont deux télégrammes