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PROMENADE AVEC GABRIÉLLE

a petit président, amoureux de la présidente. Je pouvais du moins être Gulliver pour tous les > autres siècles, et ne m’en privais point ; la guerre de Troie, la conquête des Gaules se déroulaient pour moi entre des êtres minuscules, qui per ; daient juste une goutte de sang, mourant tout pâles, dans des pays où les fleurs, les arbres, les oiseaux gardaient leur taille d’aujourd’hui. Si l’amour consiste à aimer tout, j’aimais déjà ! C’était la patience ; j’ouvrais mes lettres au coupe papier, mes noisettes au casse-noix. J’autorisai les trois architectes du Palais de l’Agriculture à R ne l’achever que dans deux ans. En voulaient-ils il quatre et ajouter des tours ? Je comprenais si bien qu’un ouvrier passât toute sa vie à sculpter une fenêtre, que-son fils, si elle était inachevée, J la terminât, s’en remettant au petit-fils pour la î lanterne. J’admettais tous les écarts à notre J humble emploi du temps, tout ce qui me vexait, quand j’étais enfant, comme une injure à l’homme.: le comètes, les fleurs qui fleurissent L tous les dix ans. J’eusse admis —·— mais je le cachai aux architectes, — les phares qui tournent tous les cent ans. Rassuré sur la dernière fin du monde, j’attendais paisiblement la prochaine. Cependant je mforçanisai de mon mieux pour r

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