Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/233

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Oh ! l’espace est si grand, si vaste est l’étendue,
Qu’étourdi par la course, il faudra bien qu’un jour
Je te retrouve enfin, tranquillité perdue
De mon cœur qu’ont lassé les rêves de l’amour ! »

En vain auprès de lui perfides et charmantes,
Mariant tendrement leurs voix aux timbres d’or,
La Joie aux yeux divins, la Gloire, les amantes
Aux fiers refus, semblaient lui dire : « Espère encore ! »

Et ceux qui, s’éprenant de sa mélancolie,
Avaient donné le gîte à ce bohémien,
Et, remettant la foi dans son âme avilie,
Avaient dit : « Nous serons ton guide et ton soutien, »

En vain aussi ceux-là le retenaient. Plus pâle,
Il reprenait : « Adieu ! pour le combat tenté
Je n’ai pas, mes amis, un courage assez mâle ;
Accusez, s’il le faut, ma triste lâcheté.

Mais à quoi bon la lutte, à quoi bon la victoire,
En ce temps où les yeux se détournent de nous,
Où nul écho lointain ne redira l’histoire
Des vaincus énervés, des vainqueurs forts et doux !

Quand, même les haillons de la Muse sacrée,
Dont le poète encor pouvait s’enorgueillir,
Ne sont plus maintenant qu’une sale livrée
Dont mille nains bouffons se parent à plaisir.