Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/350

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hôte, qu’il n’avait pas même semblé apercevoir, s’était conduit comme on devait l’attendre d’un homme de sa condition.

Mohsèn, d’un geste de sa main gauche, parut engager la jeune femme à accepter l’invitation, et Djemylèh se dirigea vers la porte basse conduisant à l’appartement des femmes ; elle était à peine engagée dans le couloir étroit que, tout à coup, par un mouvement rapide, Mohsèn se jeta sur ses pas, l’atteignit au moment où la servante levait le voile intérieur, la prit par la main, l’entraîna, et se mettant à courir avec elle, jetant brusquement de côté deux domestiques qui essayèrent de l’arrêter, il se précipita dans un petit jardin rempli de fleurs, au milieu duquel était un bassin de marbre blanc avec un jet d’eau, et, montant les trois degrés qu’il vit conduire à une portière de soie bariolée à fond rouge, il écarta l’étoffe, entra dans une vaste salle, ou, apercevant, assises sur le tapis, dans un coin, trois dames, dont l’une était âgée et l’autre très-jeune, il se prosterna devant la plus âgée, Djemylèh à son côté, et, prenant dans ses mains le bord de la robe de celle qu’il supposait être la maîtresse de la maison, il s’écria :

— Protection !

La stupéfaction se peignit sur les traits de celle qu’il implorait ainsi et de ses deux compagnes. Leurs regards se portaient alternativement sur le téméraire envahisseur du lieu saint et sur celle qui l’accompagnait ;