Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 1.djvu/163

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Je n’insiste pas, en ce moment, sur cette idée. Je ne veux pas entrer en lutte apparente, même avec de simples interprétations, du moment qu’elles sont accréditées. Je me contente d’indiquer qu’on pourrait peut-être, sans sortir des limites imposées par l’Église, en contester la valeur ; puis je me rabats à chercher si, en admettant, telle quelle, la partie fondamentale de l’opinion des Unitaires, il n’y aurait pas encore moyen d’expliquer les faits autrement qu’ils ne font, et d’examiner si les différences physiques et morales les plus essentielles ne peuvent pas exister entre les races humaines et avoir toutes leurs conséquences, indépendamment de l’unité ou de la multiplicité d’origine première ?

On admet l’identité ethnique pour toutes les variétés canines (1)[1] ; qui donc, cependant, ira entreprendre la thèse difficile de constater chez tous ces animaux, sans distinction de genres, les mêmes formes, les mêmes tendances, les mêmes habitudes, les mêmes qualités ? Il en est de même pour d’autres espèces, telles que les chevaux, la race bovine, les ours, etc. Partout : identité quant à l’origine, diversité pour tout le reste, et diversité si profondément établie qu’elle ne peut se perdre que par les croisements, et même alors les types ne reviennent pas à une identité réelle de caractère. Tandis que, tant que la pureté de race se maintient, les traits spéciaux restent permanents et se reproduisent, de génération en génération, sans offrir de déviations sensibles.

Ce fait, qui est incontestable, a conduit à se demander si, dans les espèces animales soumises à la domesticité et en ayant contracté les habitudes, on pouvait reconnaître les formes et les instincts de la souche primitive. La question paraît devoir demeurer insoluble. Il est impossible de déterminer quelles devaient être les formes et le naturel de l’individu primitif, et de combien s’en éloignent ou s’en rapprochent les déviations placées aujourd’hui sous nos yeux, Un très grand nombre de végétaux offrent le même problème. L’homme surtout, la créature la plus intéressante à connaître dans ses origines, semble se refuser à tout déchiffrement, sous ce rapport.

  1. M. Frédéric Cuvier, entre autres Annales du Muséum, t. XI, p. 458.