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grandeur et d’indépendance toute particulière aux souverains qui le portaient. Dans l’île, comme sur le continent, on en comprenait parfaitement la portée, car, lorsque Charlemagne eut pris la succession de Constantin V, il se qualifia très bien, dans une lettre à Egbert, d’empereur des chrétiens orientaux, et salua son correspondant du titre d’empereur des chrétiens occidentaux (1)[1].

Les rapports de race existant entre les Britto-Romains et les tribus germaniques venues du Jutland (2)[2] servaient puissamment à amener entre elles le compromis qui se fondait nécessairement, du côté des vaincus, sur l’abandon de la plupart des importations du sud, sur l’acceptation des idées germaniques, et, du côté des vainqueurs, sur certaines concessions à faire aux nécessités d’une administration plus sévère et plus fortement constituée que celle dont ils s’étaient fait gloire jusqu’alors de porter le joug facile (3)[3]. On vit s’établir des institutions tenant encore de très près à l’origine Scandinave. La tenure des terres dans la forme de l’odel et du féod, l’usage des droits politiques basé exclusivement sur la possession territoriale, le goût de la vie agricole, l’abandon graduel de la plupart des villes (4)[4], l’accroissement du nombre des villages, surtout des


(1) Guillaume le Conquérant porta encore le titre de basileus. Il semblerait qu’il fût le dernier souverain anglais qui en ait fait usage. (Palsgrave, ouvr. cité, t. I, p. CCCXLIII.)

(2) Le titre d’Anglo-Saxons, appliqué aux conquérants de l’Angleterre d’une certaine époque, n’implique pas l’idée que tous ces hommes fussent d’une seule nation. Ils avaient parmi eux des Warègues, des Juthungs, des Saxons de Thuringe, etc. (Kemble, ouvr. cité, t. I, p. 50 et Anhang. A.) L’inspection des noms de lieux en Angleterre montre également que, de même que dans l’Europe occidentale, les tribus les plus diverses composaient de leurs contingents les armées de l’invasion.

(3) Palsgrave insiste avec beaucoup de sagacité sur les rapports d’origine qui existèrent à toutes les époques entre les diverses couches des habitants de l’Angleterre, et il en tire les conséquences. (Ouvr. cité, t. 1, p. 35.)

(4) Kemble, Die Sachsen in England, t. II, p. 259 et seqq. — Il arriva pour les villes bretonnes de l’Angleterre ce qui avait eu lieu pour les cités celtiques de la Germanie. Elles n’étaient pas assez riches


  1. (1) Guillaume le Conquérant porta encore le titre de basileus. Il semblerait qu’il fût le dernier souverain anglais qui en ait fait usage. (Palsgrave, ouvr. cité, t. I, p. CCCXLIII.)
  2. (2) Le titre d’Anglo-Saxons, appliqué aux conquérants de l’Angleterre d’une certaine époque, n’implique pas l’idée que tous ces hommes fussent d’une seule nation. Ils avaient parmi eux des Warègues, des Juthungs, des Saxons de Thuringe, etc. (Kemble, ouvr. cité, t. I, p. 50 et Anhang. A.) L’inspection des noms de lieux en Angleterre montre également que, de même que dans l’Europe occidentale, les tribus les plus diverses composaient de leurs contingents les armées de l’invasion.
  3. (3) Palsgrave insiste avec beaucoup de sagacité sur les rapports d’origine qui existèrent à toutes les époques entre les diverses couches des habitants de l’Angleterre, et il en tire les conséquences. (Ouvr. cité, t. 1, p. 35.)
  4. (4) Kemble, Die Sachsen in England, t. II, p. 259 et seqq. — Il arriva pour les villes bretonnes de l’Angleterre ce qui avait eu lieu pour les cités celtiques de la Germanie. Elles n’étaient pas assez riches ni assez fortement constituées pour résister à l’influence hostile du milieu où elles se trouvaient placées. Peu à peu leurs institutions romaines se germanisèrent, et dès lors la vie agricole, les envahissant, tendit à dissoudre leurs bourgeoisies, ou du moins à les transformer.