Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/174

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FAUST.

Veux-tu, pour nous introduire ici, te présenter comme diable ?

MÉPHISTOPHÉLÈS.

Je suis, il est vrai, fort habitué à aller incognito ; un jour de gala cependant, on fait voir ses cordons. Une jarretière ne me distingue pas, mais le pied du cheval est ici fort honoré. Vois-tu là cet escargot ? Il arrive en rampant, tout en tâtant avec ses cornes ; il aura déjà reconnu quelque chose en moi. Si je veux, aussi bien, je ne me déguiserai pas ici. Viens donc, nous allons de feux en feux : je suis le demandeur, et tu es le galant. (À quelques personnes assises autour de charbons à demi consumés.) Mes vieux messieurs, que faites-vous dans ce coin-ci ? Je vous approuverais, si je vous trouvais gentiment placés dans le milieu, au sein du tumulte et d’une jeunesse bruyante. On est toujours assez isolé chez soi.


GÉNÉRAL.

Aux nations bien fou qui se fiera !
Car c’est en vain qu’on travaille pour elles ;
Auprès du peuple, ainsi qu’auprès des belles,
Jeunesse toujours prévaudra.


MINISTRE.

L’avis des vieux me semble salutaire,
Du droit chemin tout s’éloigne à présent.
Au temps heureux que nous régnions, vraiment
C’était l’âge d’or de la terre.


PARVENU.

Nous n’étions pas sots non plus, Dieu merci,
Et nous menions assez bien notre affaire ;
Mais le métier va mal en ce temps-ci,
Que tout le monde veut le faire.


AUTEUR.

Qui peut juger maintenant des écrits
Assez épais, mais remplis de sagesse ?
Nul ici-bas. — Ah ! jamais la jeunesse
Ne fut plus sotte en ses avis.