Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/314

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

les étudiants étaient bien surpris de ce qu’il avait été si dévoyé, et que, pour une science trompeuse, remplie d’impostures et d’illusions, il se fût ainsi mis en danger de s’être donné au diable en corps et en âme ; cela les affligeait beaucoup, car ils l’aimaient tendrement. Ils lui dirent : « Ah ! monsieur Fauste, où vous êtes-vous réduit, que vous ayez si longtemps tenu cela secret, sans en rien dire, et ne nous avez point révélé plus tôt cette triste affaire ? Nous vous eussions délivré de la tyrannie du diable par le moyen des bons théologiens. Mais, maintenant, c’est une diffamie et une chose honteuse à votre corps et à votre âme. » Le docteur Fauste leur répondit : « Il ne m’a été nullement loisible de ce faire, quoique j’en aie eu souvent la volonté. Comme là-dessus un voisin m’avait averti, j’eusse suivi sa doctrine, pour me retirer de telles illusions et me convertir ; mais, comme j’avais fort bien la volonté de le faire, le diable vint qui me voulut enlever, comme il fera cette nuit, et me dit qu’aussitôt que je voudrais entreprendre de me convertir à Dieu, il m’emporterait avec soi dans l’abîme des enfers. »

Comme donc ils entendirent cela du docteur Fauste, ils lui dirent : « Puisque maintenant il n’y a pas moyen de vous garantir, invoquez Dieu, et le priez que, pour l’amour de son cher fils Jésus-Christ, il vous pardonne, et dites : « Ah ! mon Dieu, soyez miséricordieux à moi, pauvre pécheur, et ne venez point en jugement contre moi ; car je ne puis pas subsister devant vous, et combien qu’il me faille laisser mon corps au diable, veuillez néanmoins garantir mon âme ! » S’il plaît à Dieu, il vous garantira. » Il leur dit qu’il voulait bien prier Dieu, et qu’il ne voulait pas se laisser aller comme Caïn, lequel dit que ses péchés étaient trop énormes pour en pouvoir obtenir pardon. Il leur récita aussi comme il avait fait ordonnance par écrit de sa fosse pour son enterrement. Ces étudiants et bons seigneurs, comme ils donnèrent le signe de la croix sur Fauste pour se départir, pleurèrent et s’en allèrent l’un après l’autre.

Mais le docteur Fauste demeura au poêle, et, comme