Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/392

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

COLOMB



Courage, brave navigateur ! La raillerie peut attaquer tes espérances, les bras de tes marins peuvent tomber de fatigue… Va toujours ! toujours au couchant ! Ce rivage que tu as deviné, il t’apparaîtra bientôt dans toute sa splendeur. Mets ta confiance dans le Dieu qui te guide, et avance sans crainte sur cette mer immense et silencieuse. — Si ce monde n’existe pas, il va jaillir des flots exprès pour toi, car il est un lien éternel entre la nature et le génie, qui fait que l’une tient toujours ce que l’autre promet.




LA GRANDEUR DU MONDE


Je veux parcourir avec l’aile des vents tout ce que l’Éternel a tiré du chaos ; jusqu’à ce que j’atteigne aux limites de cette mer immense et que je jette l’ancre là où l’on cesse de respirer, où Dieu a posé les bornes de la création !

Je vois déjà de près les étoiles dans tout l’éclat de leur jeunesse, je les vois poursuivre leur course millénaire à travers le firmament, pour atteindre au but qui leur est assigné ; je m’élance plus haut… Il n’y a plus d’étoiles !

Je me jette courageusement dans l’empire immense du vide, mon vol est rapide comme la lumière… Voici que m’apparaissent de nouveaux nuages, un nouvel univers et des terres et des fleuves…

Tout à coup, dans un chemin solitaire, un pèlerin vient à moi : « Arrête, voyageur, où vas-tu ? — Je marche aux limites du monde, là où l’on cesse de respirer, où Dieu a posé les bornes de la création !

— Arrête ! tu marcherais en vain : l’infini est devant toi. » Ô ma pensée ! replie donc tes ailes d’aigle ! Et toi,