Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/418

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champs, couchait les forêts à terre, et chassait de leur lit les fleuves et les lacs.

Il fondit les neiges des montagnes et les précipita en torrents dans les plaines ; les rivières s’enflèrent encore, et bientôt tout le plat pays n’offrit plus que l’aspect d’une mer, dont les vagues effrayantes roulaient des rocs déracinés.

Il y avait dans la vallée un pont jeté entre deux rochers, soutenu sur d’immenses arcades, et au milieu une petite maison que le gardien habitait avec sa femme et ses enfants. Gardien du pont, sauve-toi vite !

L’inondation menaçante monte toujours ; l’ouragan et les vagues hurlaient déjà plus fort autour de la maison ; le gardien monta sur le toit, jeta en bas un regard de désespoir : « Dieu de miséricorde ! au secours ! nous sommes perdus !… au secours ! »

Les glaçons roulaient les uns sur les autres, les vagues jetaient sur les rives des piliers arrachés au pont, dont elles ruinaient à grand bruit les arches de pierre ; mais le gardien tremblant, avec ses enfants et sa femme, criait plus haut que les vagues et l’ouragan.

Les glaçons roulaient les uns sur les autres, çà et là vers les rives, et aussi les débris du pont ruiné par les vagues, et dont la destruction totale s’approchait : « Ciel miséricordieux, au secours ! »

Le rivage éloigné était couvert d’une foule de spectateurs grands et petits ; et chacun criait et tendait les mains, mais personne ne voulait se dévouer pour secourir ces malheureux ; et le gardien tremblant, avec ses enfants et sa femme, criait plus haut que les vagues et l’ouragan.

Quand donc retentiras-tu, chanson du brave homme, aussi haut que le son des orgues et le bruit des cloches ? Dis enfin son nom, répète-le, ô le plus beau de tous mes chants !… La destruction totale du pont s’approche… Brave homme, brave homme, montre-toi !

Voici un comte qui vient au galop, un noble comte sur son grand cheval : qu’élève-t-il avec la main ? Une bourse