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BURGER

« Vous voici à propos, cavaliers ; soyez les bienvenus à cette noble chasse. Il n’est point de plus doux plaisir sur la terre comme dans les cieux. » Ainsi parlait le comte, se frappant gaiement sur les hanches et lançant en l’air son chapeau.

« — Le son du cor, dit avec douceur le cavalier de droite, s’accorde mal avec les cloches et les chants des fidèles ; retourne chez toi ; ta chasse ne peut être heureuse aujourd’hui ; écoute la voix de ton bon ange, et ne te laisse point guider par le mauvais.

— En avant ! en avant ! mon noble seigneur, s’écria aussitôt le cavalier de gauche ; que vient-on nous parler de cloches et de chants d’église ? La chasse est plus divertissante ; laissez-moi vous conseiller ce qui convient à un prince, et n’écoutez point ce trouble-fête.

— Ah ! bien parlé ! mon compagnon de gauche ; tu es un homme selon mon cœur. Ceux qui n’aiment pas courir le cerf peuvent s’en aller dire leurs patenôtres ; pour toi, mon dévot compagnon, agis à ta fantaisie, et laisse-moi faire de même. »

Harry ! hourra ! Le comte s’élance à travers champs, à travers monts… Les deux cavaliers de droite et de gauche le serrent toujours de près… Tout à coup un cerf dix cors tout blanc vient à se montrer dans le lointain.

Le comte donne du cor ; piétons et cavaliers se précipitent sur ses pas. Oh ! oh ! en voilà qui tombent et qui sont tués dans cette course rapide : « Laissez-les, laissez-les rouler jusqu’à l’enfer ! cela ne doit point interrompre les plaisirs du prince. »

Le cerf se cache dans un champ cultivé, et s’y croit bien en sûreté ; soudain un vieux laboureur se jette aux pieds du comte en le suppliant : « Miséricorde ! bon seigneur, miséricorde ! ne détruisez point le fruit des sueurs du pauvre ! »

Le cavalier de droite se rapproche et fait avec douceur quelques représentations au comte ; mais celui de gauche l’excite, au contraire, à s’inquiéter peu du dommage, pourvu qu’il satisfasse ses plaisirs. Le comte, mé-