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POÉSIES ALLEMANDES

« Fuis, monstre ! fuis ! car de cet instant le démon et sa meute infernale te poursuivront dans l’éternité : ton exemple sera l’effroi des princes qui, pour satisfaire un plaisir cruel, ne ménagent ni Dieu ni les hommes. »

La forêt s’éclaire soudain d’une lueur pâle et blafarde…

Le comte frissonne… l’horreur parcourt tous ses membres, et une tempête glacée tourbillonne autour de lui.

Pendant l’affreux orage, une main noire sort de terre, s’élève, s’appuie sur sa tête, se referme, et lui tourne le visage sur le dos.

Une flamme bleue, verte et rouge éclate et tournoie autour de lui… Il est dans un océan de feu ; il voit se dessiner à travers la vapeur tous les hôtes du sombre abîme ;… des milliers de figures effrayantes s’en élèvent et se mettent à sa poursuite.

À travers bois, à travers champs, il fuit, jetant des cris douloureux ; mais la meute infernale le poursuit sans relâche, le jour dans le sein de la terre, la nuit dans l’espace des airs.

Son visage demeure tourné vers son dos ; ainsi il voit toujours dans sa fuite les monstres que l’esprit du mal ameute contre lui ; il les voit grincer des dents et s’élancer prêts à l’atteindre.

C’est la grande chasse infernale qui durera jusqu’au dernier jour, et qui souvent cause tant d’effroi au voyageur de nuit. Maint chasseur pourrait en faire de terribles récits, s’il osait ouvrir la bouche sur de pareils mystères.