Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/258

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

254 LES ANNEES D’APPRENTISSAGE

d’amour n’était pas prononce. Lothaire partait et revenait, il revenait et partait. Et maintenant, mon ami, il est temps que vous partiez aussi. »

CHAPITRE XVII.

Wilhelm ne pouvait différer plus longtemps sa visite aux correspondants de sa maison. Il ne la fit pas sans embarras, car il savait qu’il trouverait chez eux des lettres de sa famille. Il appréhendait les reproches qu’elles devaient renfermer. Vraisemblablement, on avait aussi informé la maison de commerce de l’inquiétude où l’on était au sujet du voyageur. Après tant d’aventures chevaleresques, il craignait de paraître comme un écolier, et il résolut de payer d’audace pour cacher son embarras. Mais, à sa grande surprise, à sa grande satisfaction, tout se passa fort bien et fort doucement. Dans le comptoir vaste, animé, affairé, on eut à peine le temps de chercher ses lettres ; on ne fit mention qu’en passant de son long retard, et lorsqu’il eut ouvert les lettres de son père et de son ami, il les trouva, en somme, fort modérées. Le vieillard, espérant que Wilhelm lui enverrait un journal détaillé, qu’à son départ il lui avait soigneusement recommandé de rédiger, et dont il lui avait. même tracé le plan paraissait assez tranquillisé sur le silence des premiers temps, et se plaignait seulement du style énigmatique de la première et unique lettre qu’il avait écrite du château du comte. Werner se contentait de plaisanter à sa façon ; il racontait les joyeuses anecdotes de la ville, et demandait des nouvelles d’amis et de connaissances, que Wilhelm verrait, en nombre, dans la grande ville de commerce. Notre ami, enchanté d’en être quitte à si bon marché, répondit aussitôt par quelques lettres fort gaies, et promettait à son