Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/337

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DE WILHELM MEISTER. 333 P~pmnfÏ~hnT’n~annif~tm~o’nT’pmi nt~tttnuTn~

donnait une leçon de harpe à un jeune garçon. i] témoigna beaucoup de joie de revoir Wilhelm, se leva et lui tendit la main en lui disant

& Vous voyez que je suis encore bon à quelque chose en ce monde. Permettez-moi de continuer, car les heures sont réglées. s

Le pasteur accueillit Wilhelm de la manière la plus amicale ; il lui apprit que le vieillard était déjà beaucoup mieux, et qu’on pouvait espérer son complet rétablissement.

L’entretien tomba naturellement sur la manière de traiter les aliénés, et le pasteur s’exprima en ces termes

« Abstraction faite des causes physiques, qui nous opposent souvent des difficultés insurmontables, et sur lesquelles je prends les avis d’un sage médecin, je trouve très-simples les moyens de guérir la folie ce sont les mêmes par lesquels on empêche les hommes de bon sens de devenir fous. Que l’on excite leur activité personnelle, qu’on les accoutume à l’ordre, qu’on leur fasse voir que leur existence et leur sort sont les mêmes que ceux de beaucoup d’autres ; qu’un talent extraordinaire, que le plus grand bonheur et le plus grand malheur, ne sont que de légères déviations du cours ordinaire des choses : alors la folie ne trouvera chez eux aucun accès, et, si elle existe, elle disparaîtra insensiblement. J’ai réglé les heures du vieillard il donne à quelques enfants des leçons de harpe ; il aide à travailler au jardin, et il a déjà beaucoup plus de sérénité, ïl désire manger du chou qu’il plante, il veut que mon fils, à qui, en cas de mort, il a donné sa harpe, devienne un bon musicien, afin d’être en état de s’en servir à son tour. Comme pasteur, je ne hasarde que peu d’observations sur ses étranges scrupules ; mais une vie active amène avec elle tant d’évéments, qu’il doit bientôt sentir que la seule activité peut lever toute espèce de doutes. Je. vais à l’œuvre doucement. Si je puis obtenir encore qu’il renonce à sa barbe et à sa longue robe, j’aurai beaucoup gagné, car il n’est rien qui nous dispose plus à la folie que de nous distinguer des autres, et rien ne maintient plus sûrement le sens commun que de vivre, avec beaucoup de gens, selon la règle commune. Et combien de choses, hélas’ dans notre éducation et nos institutions civiles, ne