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370 LES ANNÉES D’APPRENTISSAGE

tachait à ce monde, et j’étais convaincue que je n’y trouverais jamais le vrai bonheur j’étais donc parfaitement sereine et tranquille, et, tandis queje renonçais à la vie, je recouvrai la santé. J’eus à soutenir une nouvelle épreuve ma mère fut tout à coup atteinte d’une grave infirmité, qu’elle endura cinq ans, avant de payer le tribut à la nature. Ce fut pour nous une époque de tribulations diverses. Souvent, quand son angoisse était trop forte, ma mère nous faisait appeler à son chevet pendant la nuit, pour trouver dans notre présence quelque distraction, sinon du soulagement. Le fardeau devint plus pesant et à peine supportable, quand mon père commença lui-même a se trouver souffrant. Des sa jeunesse, il avait eu souvent de violents maux de tête, mais qui duraient au plus trente-six heures. Maintenant ils étaient devenus continuels, et, lorsqu’ils étaient au plus haut point, sa souffrance me déchirait le cœur. C’est au milieu de ces orages que je sentais le plus ma faiblesse corporelle, parce qu’elle m’empêchait de remplir mes plus saints et plus chers devoirs, ou du moins m’en rendait l’accomplissement très-pénible. Alors je pus me juger et me demander si la voie que j’avais suivie était celle de l’erreur ou de la vérité si je n’avais fait que penser d’après les autres, ou si l’objet de ma croyance avait de la réalité, et, à ma grande consolation, cette réalité me fut toujours démontrée. J’avais cherché et trouvé la juste direction de mon cœur vers Dieu, l’union avec ses enfants bien-aimés’, et c’était là ce qui me rendait tous les fardeaux plus légers. Comme un voyageur cherche l’ombrage, mon âme se Mtait de chercher cet asile, quand tous les chagrins m’assiégeaient, et je ne revins jamais sans soulagement.

Dans ces derniers temps, quelques défenseurs de la religion, qui semblent avoir plus de zèle que de véritable piété, ont demandé à ceux qui partagent leurs croyances de faire connaître les cas où leurs prières auraient été exaucées, apparemment parce qu’ils voudraient avoir des lettres scellées, pour lutter diplomatiquement et juridiquement contre leurs adversaires. Combien le véritable sentiment leur doit être inconnu, et qu’ils doivent eux-mêmes avoir fait peu d’expériences effectives 1. Ces mots sont en anglais dans te texte beloved ones.