Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/145

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

son fils, dont il méconnaît les vertus et dont il chérit les défauts. Aussi les anciens disaient-ils que les fils des héros deviennent des vauriens, et j’ai assez observé le monde pour m’éclairer là-dessus. Heureusement notre ami, pour qui je vous remettrai quelques mots, vous donnera aussi sur ce sujet les meilleures directions. Dans notre dernière. entrevue, qui remonte à quelques années, il me parla beaucoup d’une association pédagogique, qui ne me parut qu’une sorte d’utopie ; je crus voir, sous une apparence de réalité, une suite d’idées, de conceptions, de projets et de plans, enchaînés ensemble, il est vrai, mais qui pourraient difficilement se rencontrer dans le cours ordinaire des choses. Cependant, comme je sais qu’il aime à représenter par des images le-possible et l’impossible, je ne fis pas d’objections, et maintenant la chose nous vient très à propos ; il saura sans doute vous dire, en détail, à qui vous pouvez remettre votre fils avec confiance, pour attendre d’une sage direction les plus heureux succès. «

Comme ils cheminaient, s’entretenant de la sorfe, ils remarquèrent une noble villa, des bâtiments d’un goût sévère et gracieux à la fois, une place libre sur le devant, et, alentour, des arbres d’une belle croissance, formant une imposante et vaste ceinture, mais les portes et les volets absolument fermés, tout solitaire, quoique paraissant bien entretenu. Nos voyageurs apprirent d’un homme âgé, qui était occupé à l’entrée, que c’était l’héritage d’un jeune homme, qui le tenait de son père, mort depuis peu dans un âge avancé.

Ayant fait de nouvelles questions, ils apprirent qu’aux yeux de l’héritier, tout cela était trop fini ; il n’y trouvait plus rien à faire, et jouir du présent n’était pas trop son fait : il avait donc cherché un emplacement plus près des montagnes, où il bâtissait des chaumières pour lui et ses amis, et voulait établir une sorte d’ermitage pour la chasse. Quant à l’homme qui leur donnait ces détails, ils apprirent que c’était le concierge, attaché au domaine par le testateur, et chargé de veiller avec le plus grand soin à l’entretien et à la propreté, afin qu’un jour quelque petit-fils, entrant dans les goûts et la propriété de l’aïeul, trouvât tout comme il l’avait laissé.

Après qu’ils eurent poursuivi quelque temps leur chemin en