Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/372

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Enfin une voiture s’arrêfa devant la porte : c’était la dame. Elle apprit que son mari avait dû sortir quelques heures auparavant. En montant l’escalier, elle ne parut faire aucune attention à cette illumination de fête. La vieille apprit d’un laquais qu’un accident leur était arrivé en route ; que la voiture avait versé dans un fossé, et tout ce qui s’ensuit.

La dame entra dans la salle à manger.

« Que signifie cette mascarade ? dit-elle, à la vue des enfants.

— Madame aurait eu beaucoup de plaisir, répondit la femme de chambre, si elle était arrivée quelques heures plus tôt. »

Les enfants, brusquement réveillés, s’élancèrent du sofa, et, voyant leur mère devant eux, ils se mirent à débiter leur compliment. Ils allèrent quelque temps l’un et l’autre’avec embarras ; puis, n’étant ni encouragés ni secourus, ils hésitèrent ; enfin ils s’arrêtèrent tout court, et les pauvres petits furent envoyés au lit avec quelques caresses. La dame, se voyant seule, se jeta sur le sofa et versa des larmes amères.

Il est nécessaire maintenant 3e donner quelques détails sur cette dame et sur la fête champêtre qui semble s’être mal terminée. Albertine était une de ces femmes auxquelles on ne sait que dire dans le tête-à-léte, mais que l’on rencontre avec plaisir dans le grand monde. Lh, elles paraissent le véritable ornement d’un cercle, dont elles savent écarter par leurs charmes la langueur et l’ennui. Leur grâce, pour se produire, pour se déployer à l’aise, a besoin d.’yn certain espace ; leur action veut un grand théâtre ; il leur faut un élément qui les porte, qui les force d’être aimables ; dans le particulier, elles savent à peine se faire supporter,

L’ami de la maison n’avait gagné et ne conservait ses bonnes grâces que pour avoir su l’entretenir dans un mouvement continuel, et l’entourer d’une société peu nombreuse, il est vrai, mais disposée au plaisir. Dans la distribution des rôles, il choisissait pour lui les pères nobles, et, par une action décente et sage, il savait garder la prépondérance sur le premier, le deuxième et le troisième amoureux.

Florine, qui possédait une terre noble dans le voisinage, habitait l’hiver à la ville ; elle avait des obligations à Odoardo, dont l’administration produisait, d’une manière accidentelle, mais