Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VIII.djvu/159

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de ma grand’mère ou d’une de mes tantes n’avait pas été sans effet. J’étais assez grand garçon pour prétendre aussi à quelque influence. C’est pourquoi, pour être agréable à mes amis, qui déclaré : ent qu’ils me seraient extrêmement obligés de ma complaisance, je surmontai ma timidité de peiit-fils, et me chargeai île présenter une requête qui me fut remise.

Un dimanche, après dîner, mon grand-père était occupé dans son jardin (car l’automne approchait), et je cherchais à lui rendre de petits services : après quelque hésitation, je lui présentai ma demande et la requête. Il y jeta les yeux, et me demanda si je connaissais ce jeune homme. Je lui rapportai en gros ce qu’il y avait à dire, et il s’en contenta. « S’il a du mérite et de bons témoignages, je lui serai favorable à cause de lui et à cause de toi. » Il n’en dit pas davantage, et je fus longtemps sans rien apprendre de l’affaire. Depuis quelque temps, j’avais remarqué que Marguerite ne filait plus, et qu’elle s’occupait de coulure, et même de travaux très-délicats, ce qui m’étonnait d’autant plus que les jours avaient déjà diminué, et que l’hiver approchait. Je ne m’y arrêtai pas davantage, mais je m’inquiétai de la trouver quelquefois absente le matin, contre son habitude ; et regrettais de ne pouvoir, sans questions indiscrètes, apprendre où elle était allée. Mais je fus un jour étrangement surpris. Ma sœur, qui faisait ses apprêts pour un bal, me pria d’aller lui acheter chez une marchande de modes des fleurs « italiennes. » On les faisait au couvent ; elles étaient petites et mignonnes ; les myrtes surtout, les rosés naines, et d’autres fleurs encore, étaient d’une beauté et d’une vérité remarquables. Je lui rendis ce service, et j’allai à la boutique où je l’avais souvent accompagnée. A peine étais-je entré et avais-je salué la maîtresse, que je vis assise auprès de la fenêtre une demoiselle, qui me parut très-jeune et très-jolie sous son bonnet de dentelles, et très-bien faite sous son mantelet de soie. Je reconnus aisément en elle une ouvrière, car elle était occupée à mettre des rubans et des plumes à un chapeau. La marchande étala devant moi une longue boîte remplie de fleurs diverses. Je les examinai, et, pendant que je faisais mon choix, j’observai de nouveau la jeune demoiselle. Mais quelle ne fut pas ma surprise, quand je lui trouvai une incroyable ressemblance avec Marguerite, et que