Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VIII.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au Rœmor, d’où le baldaquin est porté par des subalternes au quartier de l’empereur. Aussitôt le maréchal héréditaire, comte de Pappenheim. monte à cheval. C’est un fort bel homme, à la taille élancée, à qui va fort bien le costume espagnol, le riche pourpoint, le manteau doré, le grand chapeau à plumes et la chevelure flottante. Il se met en marche, et, au son de toutes les cloches, les ambassadeurs le suivent à cheval au quartier de l’empereur, dans un appareil plus riche encore que le jour de l’élection. On aurait bien souhaité de s’y trouver aussi ; car, dans ce jour, on aurait voulu se multiplier. On se racontait les uns aux autres ce qui se passait là. A présent, disions-nous, l’empereur met son habit de maison, vêtement nouveau, fait sur le modèle des anciens carlovingiens. Les officiers héréditaires reçoivent les insignes impériaux et montent à cheval. L’empereur, revêtu de ses ornements, le roi des Romains, en habit espagnol, montent aussi leurs palefrois, et, cependant, l’immense cortège qui les devance nous les a déjà annoncés.

L’œil était fatigué à voir seulement la foule des domestiques et des autres employés richement vêtus, li noblesse qui passait d’un air imposant ; et, quand on vit s’avancer lentement, sur des chevaux ornés pompeusement, les ambassadeurs, les officiers héréditaires et enfin l’empereur, en costume romantique, sous le baldaquin richement brodé, porté par douze échevins et sénateurs, ayant à sa gauche, un peu en arrière, son fils en costume espagnol, on n’avait plus assez de ses yeux. On aurait voulu, par une formule magique, enchaîner du moins un instant cette apparition ; mais le cortège magnifique passa sans faire halte, et à peine eut-il laissé la place vide, que le flot populaire l’envahit aussitôt. Alors commença une nouvelle presse, car on devait ouvrir un autre abord du marché à la porte du Rœmer, et construire un pont de planches, que le cortége devait franchir à son retour. Ce qui s’était passé dans la cathédrale, les cérémonies interminables qui préparent et accompagnent l’onction, le couronnement, l’accolade, tout cela, nous eûmes un grand plaisir à nous le faire conter plus tard par ceux qui avaient sacrifié bien d’autres choses pour se trouver dans l’église. Sur l’entrefaite, nous fîmes à nos places un repas frugal : car, dans ce jour, le plus solennel de notre vie, nous dûmes nous rési-