Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/229

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se chargeait d’un petit objet ; plusieurs se réunissaient pour les plus considérables, et, comme des fourmis, ils portèrent colonnes et corniches, images et ornements, jusqu’au fleuve : là toutes ces choses furent, conformément au vœu, reçues par des bateliers, passées, débarquées sur la rive gauche, et, derechef, portées en haut par divers sentiers sur des épaules pieuses. Et comme tout se fit en même temps, on pouvait voir, en promenant de la chapelle ses regards sur le pays et le fleuve, la plus étrange procession, les sculptures et les peintures, les objets dorés et vernis, se mouvoir en file bigarrée ; et l’on éprouvait un sentiment agréable, à la pensée que chacun se promettait sous son fardeau, au milieu de son travail, joie et bénédiction pour toute sa vie. L’orgue, qui est aussi transporté, mais qui n’est pas encore établi, trouvera plus tard sa place sur une galerie vis-à-vis du maître aufel.

Alors l’énigme fut résolue ; on s’expliqua comment il se faisait que tous ces ornements fussent déjà vieillis, mais bien conservés et sans dommage, dans une église récemment restaurée.

L’état actuel de la maison de Dieu est d’autant plus édifiant qu’il nous révèle la bonne volonté, l’assistance mutuelle, une exécution bien calculée et un heureux achèvement. Voici en effet un détail qui prouve encore que tout s’est fait avec réflexion. Il fallait que le maître autel d’une église beaucoup plus grande trouvât place dans celle-ci, et l’on résolut d’en relever les murs de plusieurs pieds, ce qui fit gagner un espace décent et même richement orné. Le vieux croyant peut s’agenouiller, sur la rive gauche du Rhin, au pied du même autel devant lequel il avait prié sur la rive droite dans sa jeunesse.

La vénération des saints ossements était aussi dès longtemps traditionnelle. Les restes de saint Robert, qu’on avait autrefois touchés dévotement à Eibingen et estimés secourables, on les retrouvait ici. Bien des gens sont animés d’un joyeux sentiment, à pouvoir de nouveau s’approcher du protecteur longtemps éprouvé. Et qu’on remarque bien qu’il eût été malséant de. comprendre ces saintes reliques dans la vente, ou de les y joindre pour un prix quelconque : non, elles vinrent à saint Roch en simple don, comme un pieux surcroit. Puisse-t-on,