Page:Goldenweiser - Le Crime comme peine, la peine comme crime.djvu/74

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mes ont été tués et tués pourtant par ces mêmes individus innocents de leur mort. »

Ces mêmes individus se comportent de la même façon à la mort des détenus. En contemplant au poste l’expression de bonté répandue sur la figure calme et sévère du second détenu, mort dans l’épanouissement de sa force, extraordinairement beau de visage et de corps, Nekludoff pensait :

« Ne parlant pas déjà, ce qui se voit sur ce visage, de la possibilité d’une vie spirituelle qui était anéantie dans cet homme, on peut voir par la finesse des attaches de ses mains et de ses pieds enchaînés et par les muscles de ses membres bien proportionnés quel bel animal humain, fort et adroit c’était, et, comme animal, bien plus parfait que cet étalon isabelle qui avait été abîmé, ce qui fâchait tellement le chef des pompiers. Et pourtant on l’a épuisé et non seulement personne n’en a eu pitié comme d’un homme, mais nul ne l’a plaint comme bête de somme inutilement perdue. L’unique sentiment que sa mort provoquait chez ces gens était du dépit pour les embarras que causait la nécessité d’éloigner ce cadavre qui menaçait de se décomposer. »

Bien des partisans de l’ordre actuel considéreront ces incidents d’étapes comme un mal inévitable avec lequel il faut se réconcilier au nom du but cherché par le système pénitentiaire. « Qu’y a-t-il de si important en effet dans la mort d’un ou de deux forçats ? Que faire ! diront-ils ». Mais pour