Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/404

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suel, de gourmand, la bouche large au vilain dessin rudimentaire, caché par un aimable sourire, des pommettes particulières, des pommettes saillantes et bombées comme d’énormes loupes. À le voir avec son front blanc, ses joues colorées, la carnation rose et poupine du bas de son visage, on le prendrait pour un bibliothécaire de province vivant dans l’ombre d’un cloître de livres, sous lequel il y aurait un cellier de généreux bourgogne.

Il cause avec bavardage et à petites touches menues, sans jamais un large coup de pinceau : sa conversation ressemble à la palette d’une peintresse à l’aquarelle, toute chargée de jolis, de délicats et de timides tons.

Comme nous lui parlions de son portrait du roi Louis-Philippe, il nous dit qu’il sait que le général Dumas envoya, au mois d’août 1848, une lettre du Roi à M. de Montalivet, où Louis-Philippe écrivait à l’Assemblée pour garder ses biens, comme le plus ancien général datant de la Révolution. Cette lettre, M. de Montalivet l’aurait jetée au feu. « Je publierai cela, » ajoute-t-il. Et il reprend : « Le roi Louis-Philippe, je ne l’ai vu qu’une seule fois, quand on me présenta comme académicien. J’étais avec Hugo et Villemain. » Le Roi prit avec effusion les mains d’Hugo et le remercia très chaudement d’avoir rappelé, dans son discours, le jugement de Napoléon sur lui.

Puis, à propos de l’Académie, qualifiée la plus ancienne, Louis-Philippe dit que ce n’était pas elle, mais