Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/26

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fin à la caricature de la merveilleuse mise en scène qui a été. C’est curieux… On reste même auteur là, on sent son cœur se porter en avant dans la poitrine, comme pour porter secours à ces mauvais cabots, à leur mémoire qui trébuche, aux estropiements imbéciles de votre style… Le public m’a paru tout prendre assez bien. Il a un peu ri seulement au mot de la mère à sa fille : « C’est à moi, ça ! » J’aurais mis : « Tu es à moi, mon trésor » qu’il aurait été ravi, — absolument, disons-le, comme le public des Français. Il se passera en effet encore bien du temps avant que le mot vrai ne tue le canaille du mot noble.

En sortant de la chose représentée dans ces conditions, j’ai entendu un ouvrier dire : « Ça ne fait rien, ça doit être joliment le chic du grand monde ! »

Au fond, nous avons souffert tout le temps, comme un homme qui verrait tutoyer sa maîtresse, chez un marchand de vin, par des hommes de barrière.

— Il y a une certaine couleur raisin de Corinthe, qui paraît affectée aux redingotes des vieux acteurs.

— Apprendre à voir est le plus long apprentissage de tous les arts.

— Il est de si petits historiens de grandes choses, qu’ils font penser à ces huîtres qui attestent un déluge.