Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/205

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mandé où en était l’armée. Tout de suite, ça a été un autre homme. Plus cette inquiétante concentration, plus ces mouvements nerveux, plus ces contractions de mains impatientes et prêtes à broyer des choses. Le maréchal s’est mis à causer gaîment et alertement, des hommes, des canons, des fusils, et a terminé par cette phrase : « Oh cette année, il n’est pas probable que Bismarck nous fasse la guerre, et l’année prochaine nous serons prêts ! »

Jeudi 11 février. — Je n’ai jamais assisté à une séance de réception à l’Académie, et je suis curieux de voir de mes yeux, d’entendre de mes oreilles, cette chinoiserie.

On m’a donné un billet, et ce matin, après déjeuner, nous partons, la princesse, Mme de Galbois, Benedetti, le général Chauchard, et moi, pour l’Institut.

Ces fêtes de l’intelligence sont assez mal organisées, et par un froid très vif, on fait queue, un long temps, entre des sergents de ville maussades, et des troubades étonnés de la bousculade entre les belles dames à équipages et des messieurs à rosettes d’officiers.

Enfin nous sommes à la porte. Apparaît un maître d’hôtel. Non, c’est l’illustre Pingard, une célébrité parisienne qui doit une partie de sa notoriété à sa gnognonnerie, un homme tout en noir, avec des