Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/84

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lique ne vous semble-t-elle pas la plus abominable profanation de la mort ?

――――――― Aujourd’hui, Édouard (de Béhaine) m’entretient de ses conversations avec Bismarck, et me peint le causeur : un causeur à la parole lente, au débrouillage difficultueux, cherchant longuement le mot propre, n’acceptant pas celui qu’on jette à son germanisme dans l’embarras, mais finissant toujours par arriver à trouver l’expression juste, l’expression piquante, l’expression excellemment ironique, l’expression caractéristique de la situation.

Samedi 17 août. — Les enfants s’étaient éparpillés dans les ravines des torrents, à la recherche d’insectes et de fleurettes.

Je suis resté seul, sur le haut sommet, jouissant de ma solitude, dans ce lieu foudroyé, qui semble l’endroit affectionné de l’orage, toutes les fois que l’orage éclate dans ces montagnes. Le sol sur lequel je marchais, était de la pourriture d’écorce et de branches, où se dressaient, comme des mâts démâtés, tous les arbres brisés. Quelques-uns, arrachés de terre, montraient, retournées en l’air, leurs racines et leur chevelu emmêlé de glaise sèche. Sur ces décombres de nature, fuyant à tire d’ailes, de temps