Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/154

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Promenade autour de la forêt, le long d’un treillage de la chasse israélite, qui nous empêche d’y entrer ; promenade où Porel, joliment blaguant, à tout moment, tire sa montre et s’écrie : « À ce moment Machin dit » — et il cite un vers de Britannicus, ou bien : « Chose dit » — et il cite une phrase de la Partie de chasse de Henri IV. Au fond, sous ces ironies, le directeur est préoccupé de la recette, peste contre le beau temps qui lui fait perdre 20 000 francs, ce mois, et appelle la pluie et les frimas.

Il est amusant, spirituel, bon enfant, ce Porel ! Dans la sympathie qu’il rencontre autour de lui, il s’expansionne, s’ouvre, se confesse. Il nous avoue sa passion théâtrale dès l’enfance. Son père était un menuisier, et il avait commencé à travailler avec lui, quand on lui fit une blouse neuve… Il alla la promener, cette blouse, au boulevard Montparnasse, où le concierge faisait signe d’entrer à ceux qui se présentaient sur la porte, et dont la figure lui plaisait. Le voilà comme les autres, et agréé par le concierge. On le déshabille, et il joue un rôle d’Indien. Son rôle joué, il veut reprendre son paquet de vêtements, mais au lieu de sa jolie blouse, il ne trouve qu’un paquet de loques infectes. Il se met à pleurer. On recherche. Impossible de retrouver ses vêtements. Il faut cependant rentrer à la maison, où sa mère le reçoit à coups de balai.

Porel est en ce moment de retour de Londres, où il est allé étudier la machination qui est en enfance chez nous, exécutée par des loupeurs et des bla-