Page:Goncourt - La Fille Élisa, Charpentier, 1877.djvu/242

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L

Élisa avait espéré avec le temps s’habituer au mutisme, ne plus souffrir de la privation de la parole. Mais, au bout d’années passées en prison, elle avait le même besoin de parler qu’au premier jour. Il lui semblait même que ce long silence avait mis, au fond de sa gorge, quelque chose de furieux, d’exaspéré, et que toutes les paroles ravalées par elle voulaient, par moments, sortir dans un long aboiement furieux. Ne pouvant parler, parfois elle ne pouvait résister à se donner le semblant de la parole, à construire avec des lèvres et une langue aphones des phrases qu’elle ne s’entendait pas, mais se sentait