Page:Gontcharoff - Oblomoff, scènes de la vie russe, trad Artamoff, 1877.djvu/170

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
156
OBLOMOFF.

— Ah ! et tu soutiens que tu n’es point venimeux ? dit Oblomoff ; il m’achète pour un million de viande ! Où fourres-tu tout cela ? Si encore cela te profitait.

— Ce n’est pas moi qui l’ai mangée ! répondit grossièrement Zakhare.

— Non ! ce n’est pas toi !

— Pourquoi me reprochez-vous le pain que je mange ? Tenez, regardez !

Et il lui avançait les notes.

— Ah ! à qui encore ? dit Élie, repoussant avec dépit les papiers graisseux.

— Encore cent vingt et un roubles dix-huit kopeks au boulanger et au fruitier.

— Mais c’est la ruine ! cela ne ressemble à rien ! dit Élie hors de lui-même. Tu es donc une vache, pour ruminer tant de légumes…

— Non, je suis un être venimeux ! répliqua Zakhare avec amertume, en se détournant de son maître. Si Michée Taranntieff ne venait pas ici, il y aurait moins de dépense, ajouta-t-il.

— Eh bien ! combien cela fait-il en tout ? compte, dit Élie, et il se mit à compter lui-même.

Zakhare fit le calcul sur ses doigts.

— Que c’est donc bête ! Je trouve chaque fois un total différent, dit Oblomoff. Et toi ! combien trouves-tu ? Deux cents ?